Lidl, le distributeur allemand engagé pour les éleveurs français
Avec ses contrats tripartites pour la viande de bœuf, le porc et le lait, Lidl s’engage pour une plus juste rémunération des éleveurs. La coopérative NatUp en témoigne. Toutefois, les industriels prêts à jouer le jeu sont rares.
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Depuis quelques années maintenant, Lidl ne cesse d’afficher sa proximité avec les agriculteurs français. Le distributeur allemand a notamment fait de ses contrats tripartites son fer de lance et prône son engagement pour une juste rémunération des éleveurs.
Mais en quoi ces contrats largement médiatisés consistent-ils ? « Un contrat tripartite, c’est trois parties : Lidl, l’industriel, c’est-à-dire le transformateur, et un groupement d’éleveurs, affirme Michel Biero, directeur exécutif achats et marketing de Lidl France (en médaillon). En 2015, alors que les agriculteurs criaient leur colère sur les parkings des supermarchés, je suis allé au Salon de l’agriculture pour la première fois afin de les rencontrer et de discuter avec eux. » Et c’est à la suite de cet échange que Lidl a signé son premier contrat tripartite avec des éleveurs de porcs.
5 000 éleveurs engagés
« La première discussion que j’ai dans le cadre d’une tripartite est avec les éleveurs, ce sont eux les plus importants. On discute alors de leurs besoins en matière de rémunération et on fixe un prix conforme à leurs coûts de production, explique Michel Biero. Ensuite, on essaie de trouver ensemble un industriel qui soit d’accord pour les rémunérer à ce prix et transformer 100 % de la carcasse. Et seulement après, je négocie le prix d’achat de Lidl auprès de l’industriel. » Un contrat « d’une simplicité enfantine et tenant sur deux pages », selon lui, est alors signé par les trois parties prenantes.
5 000 éleveurs français sont engagés dans des contrats tripartites avec Lidl : cinq ont déjà été signés pour la viande de bœuf, trois pour le porc, avec la particularité de couvrir la totalité des magasins de l’enseigne, et cinq en lait avec toutefois un seul industriel impliqué. « Chacun de nos 1 570 magasins propose au moins du porc, du lait ou du bœuf équitable, c’est-à-dire issu d’une tripartite, se félicite Michel Biero. Le consommateur peut ainsi faire son choix entre un produit de qualité à un prix raisonnable et offrant la certitude que les éleveurs sont justement rémunérés et satisfaits, et un produit où on ne sait pas combien l’éleveur a été payé. »
Confiance et transparence
Aujourd’hui, 25 % du lait vendu chez Lidl provient de contrats tripartites et 19 à 20 % de la viande de bœuf et de porc. « On est très loin du 100 %. Je serais d’accord pour ne faire que du tripartite, sauf que les industriels ne sont pas d’accord et ne jouent pas le jeu », s’insurge Michel Biero. En 2015, Lidl a en effet signé son premier contrat tripartite avec un groupement d’éleveurs de porcs du nord de la France, le Ch’ti porc des Flandres, et un industriel belge. « Aucun industriel français n’avait souhaité entrer dans cette démarche de transparence et de confiance, déplore-t-il Depuis, rares sont les industriels français qui acceptent d’y entrer, et ceux qui s’engagent le font à petite échelle. »
Bigard est l’un d’entre eux. En 2018, il est entré dans une tripartite pour la transformation de viande de bœuf provenant des éleveurs de la coopérative NatUp (lire encadré). Ce contrat concerne 350 magasins Lidl, soit tous ceux d’Île-de-France, ainsi que ceux de Normandie et Bretagne.
« Aujourd’hui, Lidl est bien vu par le monde agricole parce qu’on prend des engagements forts, déclare Michel Biero. Mais ce n’est pas suffisant parce que la loi ne nous aide pas. J’explique depuis deux ans que la loi EGalim est une coquille vide, car il n’y a aucune volonté de transparence et de confiance. Elle repose sur la bonne volonté des uns et des autres et c’est pour cela qu’elle ne fonctionne pas. » Pour y remédier, Michel Biero réclame notamment à ce que soit inscrite dans la loi l’obligation des industriels à intégrer des démarches tripartites.
Revalorisation des prix
À son échelle, le distributeur tente d’entraîner davantage d’industriels français dans son sillage, mais sans succès. « Les plus gros industriels ne sont pas forcément d’accord pour entrer dans des démarches tripartites. » Toutefois, pour la troisième année consécutive, Lidl a signé avec Lactalis ainsi qu’avec Sodiaal des accords tarifaires pour une revalorisation du prix du lait. « C’est le seul moyen que l’on a pour montrer au monde agricole que Lidl met chaque année beaucoup d’argent sur la table pour rémunérer au juste prix », précise Michel Biero. Il déplore cependant l’absence de contact avec les éleveurs.
Lucie Petit
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